Grand excès de vitesse : la loi se durcit, le casier se remplit

Les compteurs du Milano
Les compteurs d’un Alfa Romeo Junior

Ce n’est pas une réforme qui fait les gros titres. Pas de jingle de journal télévisé, ni de débat enflammé en prime time. Pourtant, depuis le 9 juillet 2025, un changement discret mais lourd de conséquences a pris effet dans le Code de la route français : le grand excès de vitesse devient un délit dès la première infraction. Un vrai virage judiciaire qui pourrait bien faire déchanter quelques habitués de la file de gauche.

Plus qu’une infraction, désormais un délit

Jusqu’à récemment, un excès de 50 km/h au-dessus de la limitation n’était « qu’un » délit en cas de récidive. Désormais, une seule fois suffit pour faire basculer le conducteur dans le monde pénal. Et la panoplie de sanctions n’a rien d’anecdotique :

  • Amende salée de 3 750 €,
  • Jusqu’à 3 mois de prison,
  • Suspension de permis pendant 3 ans,
  • Confiscation pure et simple du véhicule,
  • Stage de sensibilisation obligatoire à vos frais,
  • Et potentiellement une annulation du permis assortie d’une interdiction de repasser le code avant 3 ans.

Cerise sur le gâteau : cette infraction figure désormais dans le casier judiciaire. Pas franchement idéal pour postuler à un emploi de chauffeur-livreur ou pour tenter une reconversion dans la fonction publique.

Un contexte de durcissement général

Ce tour de vis s’inscrit dans une refonte plus large du droit routier, amorcée avec l’introduction du délit d’homicide routier. Derrière cette sémantique plus lourde que l’ancien « homicide involontaire », l’intention est claire : reconnaître la gravité des comportements routiers à haut risque, notamment ceux commis sous l’emprise de stupéfiants, d’alcool, ou… en grand excès de vitesse.

C’est bien là que la notion de « circonstances aggravantes » prend tout son sens. À partir de 30 km/h au-dessus de la vitesse autorisée, l’excès est déjà aggravant. À 50 km/h, c’est l’entrée directe au pénal. Et en cas d’accident mortel, l’auteur risque jusqu’à 10 ans de prison et 150 000 € d’amende. Un seuil symbolique qui marque un changement d’époque dans l’approche répressive.

Entre pédagogie et dissuasion, le juste équilibre ?

Les associations de victimes applaudissent ce virage. Les automobilistes, eux, oscillent entre fatalisme et perplexité. Car si certains grands excès relèvent clairement de la mise en danger, d’autres peuvent, dans la pratique, frôler l’accident de contexte : 140 km/h sur une nationale limitée à 90, dans une zone vide à 3h du matin, n’a pas la même saveur qu’un 100 km/h en agglomération dense. Mais la loi ne fait pas dans la nuance.

Reste à voir si cette sévérité nouvelle portera ses fruits. En France, les grands excès de vitesse concernent environ 25 000 infractions par an, dont une part non négligeable chez des conducteurs jeunes ou peu expérimentés. La dissuasion fonctionnera-t-elle ? Peut-être. Mais l’enjeu dépasse la simple sanction : il s’agit d’un signal politique fort, dans un pays où 1 accident mortel sur 3 est lié à la vitesse.

Vers une reconfiguration de la culture automobile ?

Au fond, cette réforme marque peut-être le début d’une nouvelle ère pour les conducteurs français. Une époque où l’on ne pourra plus jouer à pile ou face avec son permis — et encore moins avec son casier judiciaire. Une ère où la voiture perd peu à peu son statut de zone grise, entre liberté et insouciance, pour devenir un espace juridiquement très encadré.

Il faudra s’y faire : à 51 km/h au-dessus, ce n’est plus une bourde, c’est un casier. Et pour certains, ce sera une prise de conscience salutaire. Pour d’autres, un réveil brutal.

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A propos de l'auteur

Sébastien Rabatel

Rédacteur en chef de Actu-Automobile.com depuis 2009, après plusieurs années en tant que journaliste reporter d'images en télévision. Passionné de voitures, il en a déjà eu une soixantaine et essayé plusieurs centaines.

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