Ferrari Daytona SP3 “599+1” : l’exception qui redonne foi en Maranello

C’est un détail, un rien, un “+1” griffonné au stylo sur une fiche de production déjà légendaire. Et pourtant, ce “+1”, c’est peut-être ce que Ferrari a fait de plus noble ces dernières années. Car derrière ce numéro se cache un pur-sang caritatif, une Daytona SP3 pas comme les autres, conçue pour une seule chose : ne rien rapporter à Ferrari. Si ce n’est un peu de grandeur.

Une Ferrari pour les autres

Ce n’était pas prévu. La Daytona SP3, c’était 599 exemplaires, pas un de plus. Tous vendus avant même que la presse n’ait le droit d’y poser les yeux. 2 millions d’euros la bête, un V12 atmosphérique qui hurle à 9500 tr/min, une silhouette rétro-futuriste inspirée des prototypes P3/4 et 412P de 1967… Bref, une icône contemporaine, pensée pour les collectionneurs, les investisseurs, les garages climatisés.

Mais voilà. Ferrari a décidé de faire une exception. Une seule. Le “+1”. Et de le faire pour de bonnes raisons.

Cette Daytona SP3 “hors quota” a été conçue pour être vendue aux enchères au profit de la Ferrari Foundation, le fonds de dotation maison. Une fondation qui ne finance pas des simulateurs ou des musées, mais des projets éducatifs et des aides à des personnes en situation de handicap. Le genre d’initiative qu’on ne s’attend pas forcément à trouver du côté de Modène. Et pourtant.

L’extase visuelle

Le moins qu’on puisse dire, c’est que cette SP3-là ne passe pas inaperçue. Le carrossier a visiblement été briefé : “Faites-la inoubliable”. Résultat : une livrée bicolore, moitié jaune Giallo Modena, moitié noir verni, le tout barré d’un immense “Ferrari” qui court en diagonale sur la carrosserie. Un graphisme audacieux, à la limite du kitch, mais pleinement assumé. Comme un drapeau hissé haut, comme un manifeste.

L’intérieur suit la même logique. Les sièges fixes sont recouverts d’un textile issu de pneus recyclés, à mi-chemin entre l’alcantara et le militantisme. Sur les panneaux de portes, un cheval cabré s’incruste façon blason baroque. Et partout, du carbone F1, celui qu’on retrouve dans les monoplaces de Charles Leclerc. Tout est unique, jusqu’à la texture en damier des éléments de planche de bord. On est loin des finitions trop sages des modèles de série.

Le feu sacré sous le capot

Mécaniquement, pas de différence avec les 599 autres : un V12 atmosphérique de 6,5 litres, 840 chevaux, 697 Nm, 0 à 100 en 2,85 secondes et une pointe à plus de 340 km/h. Le tout envoyé aux roues arrière via une boîte robotisée 7 rapports et un différentiel à glissement limité piloté électroniquement.

Pas d’hybridation, pas de turbo, pas de compromis. Juste du son, de la violence, et la sensation que la route va plier sous l’aérodynamique.

Mais cette fois, la performance ne sert pas un chrono. Elle sert une cause. Et c’est peut-être ça, le vrai luxe aujourd’hui : savoir faire autre chose que du business avec des objets aussi chers.

À vendre (mais pas pour n’importe qui)

Mise à prix ? Inconnue. Estimation ? Les experts de RM Sotheby’s évoquent plus de 5 millions d’euros, sans sourciller. Et ce ne serait pas délirant : une SP3 standard, c’est déjà deux millions. Celle-ci, avec sa robe bicolore, son numéro “+1” et son statut de pièce unique, pourrait affoler les enchères lors de la Monterey Car Week en août.

Ce n’est pas tous les jours qu’on peut acheter une Ferrari qui a du sens. Ni tous les jours qu’on en voit une qui donne envie de croire à nouveau à une forme de générosité chez les grands noms de l’industrie automobile.

Et si, finalement, le futur de Ferrari passait par là ? Par cette idée folle que la vitesse peut servir à autre chose qu’à aller vite.