Ford Focus : la fin d’une icône qui aura tenu 27 ans

La Ford Focus ST dans sa dernière génération
La Ford Focus ST dans sa dernière génération

Il y a des pages qui se tournent sans bruit, et d’autres qui vous attrapent par le col. La fin de la Ford Focus, confirmée officiellement, appartient à cette seconde catégorie. Après 27 ans de carrière, la compacte qui avait redéfini la tenue de route des familiales européennes tire sa révérence. Une sortie presque pudique pour un modèle qui, en 1998, avait dynamité un marché alors anesthésié par la routine.

L’aveu tombe dans un communiqué sobre : la Focus « a été une part importante de la famille Ford en Europe ». Formel, presque banal, mais chargé d’une mélancolie palpable. Car la Focus, c’était un jalon. La voiture qui avait remplacé l’Escort en amenant une modernité inattendue, un comportement routier encore cité en référence aujourd’hui, et une capacité à plaire aussi bien aux familles qu’aux conducteurs exigeants. Une compacte populaire, mais jamais simpliste.

Une fin annoncée… au profit de l’électrique

La décision n’est pas une surprise : Ford l’avait officialisée dès 2022. Après la Mondeo, puis la Fiesta en 2023, la Focus rejoint la liste des modèles sacrifiés sur l’autel de la transition électrique européenne. Dans l’esprit des dirigeants, la gamme devait se recentrer sur les EV comme les Explorer et Capri. Sauf que la réalité du marché a été moins docile que prévu.

Les ventes d’électriques Ford sont « inférieures aux prévisions » : c’est la marque elle-même qui l’a reconnu en annonçant de nouveaux plans sociaux. Jusqu’à 1 000 postes pourraient disparaître dans l’usine de Cologne, pourtant dédiée aux véhicules électriques. Un symbole dur : passer à l’électrique n’est pas qu’une affaire de batteries et de SUV bien calibrés, c’est aussi un jeu économique brutal, où l’enthousiasme des constructeurs n’est pas toujours suivi par le portefeuille des clients.

La dernière Ford Focus ST sort d’usine, une page d’histoire se tourne
La dernière Ford Focus ST sort d’usine, une page d’histoire se tourne

Le recul de Ford en Europe, un symptôme plus large

La fin de la Focus n’est finalement qu’un chapitre d’une histoire plus vaste : celle d’une marque qui perd de sa superbe en Europe. Seuls deux modèles entrent dans le top 100 des ventes : le Puma, et le Kuga. La disparition des Fiesta et Focus n’a pas permis de faire des étincelles avec des modèles électriques très peu vendu, en l’occurence les Explorer et Capri.

Cette bascule du public vers les SUV n’explique pas tout, mais elle révèle une tendance : les compactes classiques, même excellentes, n’ont plus le vent en poupe. Renault l’a compris avant tout le monde en transformant sa Mégane en SUV électrique. Opel, Peugeot, même Volkswagen avec l’avenir incertain de la Golf… tous naviguent à vue.

Saarlouis, la fin d’un bastion

Toutes les générations de Focus ont été assemblées dans l’usine Ford de Saarlouis, en Allemagne, un site qui produisait déjà l’Escort. Cinquante-cinq ans de savoir-faire qui se retrouvent soudain… sans voiture à fabriquer. La marque assure que l’usine sera réorientée vers la production de composants, mais personne n’est dupe : une usine sans modèle à son nom, c’est une usine à l’avenir fragile.

Le constructeur tente de rassurer les propriétaires : pièces, entretien, services… tout restera assuré. Un discours nécessaire, mais qui sonne un peu comme une main posée sur l’épaule.

Et maintenant ?

Il n’y aura pas de remplaçante directe, pas de nouvelle compacte thermique ou hybride pour rouvrir la voie. Mais Ford travaille sur une gamme d’électriques plus petites et plus abordables, une stratégie qui pourrait très bien faire renaître un jour les noms Focus ou Fiesta. Après tout, le Capri a déjà été ressuscité sous forme de coupé-SUV électrique.

La Focus s’éteint, mais son histoire reste une pierre angulaire de ce que fut Ford en Europe : audacieuse, populaire, parfois en avance sur son époque. Sa disparition raconte surtout le vertige d’une transition où même les icônes doivent laisser la place. Et ça, ce n’est pas une bonne nouvelle.

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A propos de l'auteur

Sébastien Rabatel

Rédacteur en chef de Actu-Automobile.com depuis 2009, après plusieurs années en tant que journaliste reporter d'images en télévision. Passionné de voitures, j'en ai possédé une soixantaine et essayé plusieurs centaines, tout au long de ces 16 ans d'activité pour Actu Automobile.

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