Chez Toyota, le silence est rarement bon signe. Présenté fin 2024 comme l’un des piliers de l’offensive électrique européenne, l’Urban Cruiser devait combler un vide stratégique entre l’Aygo X et le C-HR. Un SUV urbain compact, 100 % électrique, calibré pour les centres-villes et les zones à faibles émissions. Sur le papier, le profil était limpide. Dans les faits, plus d’un an après sa révélation, le modèle brille surtout par son absence sur le marché français. Et ce décalage commence à ressembler à autre chose qu’un simple retard industriel.
Un modèle déjà lancé ailleurs… sauf chez nous
L’argument de la priorité donnée à certains marchés tient rarement bien longtemps. L’Urban Cruiser est aujourd’hui commandable en Allemagne, au Royaume-Uni ou aux Pays-Bas, trois pays où la demande en véhicules électriques est forte, certes, mais pas plus structurellement que la France. Toyota y a déployé sans hésiter son SUV urbain, pendant que l’Hexagone reste à quai. Un choix d’autant plus étonnant que d’autres nouveautés, parfois annoncées bien après l’Urban Cruiser, ont déjà trouvé leur place dans les concessions françaises. Aygo X restylée, bZ4X remis à niveau, sans parler du lancement simultané du C-HR+, du nouveau RAV4 hybride et même du Hilux électrique. À ce stade, l’argument logistique commence à manquer de crédibilité.
Une disparition du configurateur qui interroge
C’est souvent dans les détails que les stratégies se dévoilent. Et celui-ci est difficile à ignorer. L’Urban Cruiser a disparu du site officiel Toyota France, là où d’autres modèles encore non commercialisés apparaissent clairement avec la mention “disponible prochainement”. Le bZ4X Touring est bien annoncé parmi les nouveautés à venir . L’Urban Cruiser, non. Une absence qui rappelle étrangement le cas du Corolla Cross, ce SUV compact hybride lancé chez plusieurs voisins européens mais jamais importé en France, faute d’un positionnement jugé suffisamment rentable.
Un cousin Suzuki et une production qui dérange
Techniquement, l’Urban Cruiser n’est pas un électron libre. Il partage sa base avec le Suzuki e Vitara, autre modèle annoncé, jamais arrivé chez nous, mais déjà visible sur d’autres marchés. Les deux véhicules seraient produits en Inde, un détail loin d’être anodin. Depuis la refonte des règles du bonus écologique, l’origine de fabrication est devenue un critère décisif. Assemblé hors d’Europe, l’Urban Cruiser serait très probablement exclu des aides françaises, à savoir la nouvelle prime coup de pouce. Et sans bonus, un SUV électrique urbain se retrouve immédiatement en difficulté face à une concurrence européenne ou chinoise mieux positionnée. Face à une Renault 4 E-TECH, ou au futur Volkswagen ID.Cross, l’Urban Cruiser ne serait peut-être pas assez compétitif.
Vers un abandon à la française ?
Toyota n’a jamais officialisé l’abandon de l’Urban Cruiser en France. Mais l’histoire récente montre que le constructeur sait renoncer sans bruit lorsqu’un modèle ne coche pas toutes les cases économiques. Le Corolla Cross en est l’exemple le plus parlant. Aujourd’hui, tous les voyants sont à l’orange. Absence prolongée, disparition du site, contexte réglementaire défavorable, concurrence interne renforcée. À moins d’un revirement stratégique ou d’une adaptation industrielle majeure, l’Urban Cruiser pourrait bien rester un SUV que les automobilistes français ne verront jamais sur leurs routes. Une occasion manquée de plus dans un segment pourtant en pleine effervescence. Mais Toyota pourrait rebondir : pourquoi pas envisager une production en Europe ?
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